Quand l’art redessine le territoire : regards croisés autour de la Biennale d’Art Contemporain de Lyon
Quand l’art redessine le territoire :
Regards croisés autour de la Biennale d’Art Contemporain de Lyon
La Biennale d’Art Contemporain de Lyon, événement incontournable de la scène artistique mondiale tisse un dialogue unique entre l’art contemporain, le territoire lyonnais et ses habitants. À travers des lieux aussi variés que les anciennes halles industrielles des Grandes Locos, ou le Grand Parc Miribel Jonage, la Biennale explore la manière dont l’art réinvente et valorise les espaces publics et naturels lyonnais.
Dans cet entretien croisé, Sabine Longin, Directrice générale de la Biennale, et l’artiste Olivia Funes Lastra, créatrice de l’installation « Au-delà de la mer, une rivière », partagent leur vision de l’interaction entre l’art et le territoire. Ensemble, elles révèlent comment la Biennale agit comme un pont entre passé et présent, patrimoine et modernité, tout en plaçant l’humain au cœur de ses projets artistiques.
Sabine Longin, pourquoi avoir choisi des lieux aussi atypiques que Les Grandes Locos ou le musée de Saint-Romain en Gal pour cette 17e édition ?
Sabine Longin : Les Grands Locos sont l’un des neuf lieux investis par la Biennale de Lyon pour cette 17e Biennale d'art contemporain de Lyon aux côtés du Musée de Saint-Romain-en-Gal au-delà des lieux historiques comme le Musée d’Art Contemporain de Lyon.
Avec leur hauteur sous plafond colossal et leur lumière zénithale, les Grandes Locos offrent des conditions idéales pour présenter des œuvres d'art monumentales, comme l’installation vidéo et sonore d’Oliver Beer, fruit de plus de six ans de réflexion. La Biennale de Lyon a un studio de production situé aux Grandes Locos, nommé Le Magasin, qui facilite la création d’œuvres d’arts, sur place, en collaboration avec des artisans et des entreprises locales, un atout rare en art contemporain.
©Blandine Soulage
Au musée de Saint-Romain-en-Gal, il se crée un dialogue subtil entre l’art contemporain et l’archéologie. Les œuvres exposées établissent des liens fascinants entre les mosaïques romaines, l’architecture ancienne, et les créations actuelles.
Olivia Funes Lastra, votre travail « Au-delà de la mer, une rivière » créé pour la Biennale d’Art Contemporain est exposé au Grand Parc Miribel Jonage et à la Médiathèque de Vaulx-en-Velin. Pouvez-vous nous l’expliquer en quelques mots ?
Olivia Funes Lastra : C’est une installation d'un ensemble de peintures textiles suspendues à l'aide de rubans dans l'espace. Les peintures viennent investir les plafonds pour venir déborder sur l'axe vertical et créer une circulation dans l'espace.
Les peintures sont des peintures textiles que j'ai faites à partir d'une série de textes écrits, notamment, à l'aide de témoignages que j'ai pu récolter auprès de certains habitants et habitantes de la ville de Vaulx-en-Velin. Ce sont aussi des textes que j'écris pour moi-même qui prennent racine dans les jeux de la traduction et qui essayent de mettre des mots sur un rapport intime à la langue où se mêlent une forme de sentiment d'exil vis-à-vis de sa langue maternelle et la cohabitation de plusieurs langues. Ces textes, je les transpose sur les tissus, et je leur donne une matérialité grâce à la couleur et le geste.
©Blandine Soulage
Est-ce que vous aviez cette installation en tête avant de découvrir ces lieux ou bien c'est une œuvre qui, a pris forme dans l’espace qui l’accueille ?
J’avais une intention en amont pour cette installation parce que je travaille d’abord avec des maquettes. Mais il existe un travail qui se fait dans les lieux. Je suis très attentive à l'espace, à l'architecture, mais aussi à son contexte.
L’analogie entre la langue et les fleuves est venue en partie par le fait d’observer le parc de Miribel Jonage et la ville de Vaulx-en-Velin.
Le canal de Jonage (qui irrigue le lac du parc) servait historiquement à alimenter en électricité les usines textiles. Une industrie ayant drainé différentes vagues migratoires qui ont participé à l'identité de la ville de Vaulx-en-Velin. J’ai donc cherché à faire rentrer ces imbrications entre le fleuve, le textile, les migrations et la langue, comme objet migratoire, en résonnance avec mon œuvre.
Sabine Longin, investir des lieux moins conventionnels pour cette 17ème édition était un objectif en soi ?
Il était important de trouver un équilibre entre ces espaces atypiques et des lieux plus traditionnels. Les lieux non conventionnels permettent d’atteindre des publics différents et d’offrir aux artistes des cadres uniques pour s’exprimer. Cependant, certains lieux doivent répondre aux normes muséales strictes nécessaires pour accueillir des œuvres d’art de grande valeur, en raison des exigences d’assurance et de conservation.
La Biennale n’est pas un musée, c’est un événement vivant et temporaire. C’est pourquoi elle investit à la fois des musées et des lieux plus inattendus, avec une double vocation : celle de permettre la création artistique et celle d’élargir l’accès au public.
Si la Biennale d’art contemporain de Lyon est bien connue des lyonnais, qu’en est-il de son influence à l’international ?
La Biennale de Lyon se distingue par son rayonnement international ! La Biennale d’art contemporain de Lyon figure parmi les cinq premières au monde, alors qu’il existe en tout plus de 80 biennales dans le monde. En danse, la Biennale de Lyon est même reconnue comme le premier événement mondial en ce domaine, selon le New York Times.
©Blandine Soulage
Chaque édition de la Biennale de Lyon attire de nombreux·se professionnel·les de l’art contemporain et de la danse à Lyon, qu’il s’agisse de directeur·rices d’établissements ou festivals culturels, de programmateur·rices de structures, de commissaires, de galeristes, de conservateur·rices ou de collectionneur·euses. Ces professionnel·les jouent un rôle crucial dans la diffusion des œuvres et l’élargissement de leur visibilité, non seulement en France, mais aussi à l’étranger. Présenter des créations inédites ou co-produites par la Biennale permet d’attirer ces expert·es, qui agissent comme des prescripteurs en intégrant ces œuvres à d’autres biennales ou expositions internationales.
Un exemple concret : une œuvre présentée lors de la Biennale de Lyon 2022 est actuellement exposée à Barcelone dans le cadre de Manifesta. Les productions lyonnaises voyagent et s’intègrent dans des contextes artistiques variés, participant activement au rayonnement culturel de la région.

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